Port de Dakhla au Maroc : le commerce maritime atlantique ciblé
Le Royaume chérifien mise sur une nouvelle infrastructure stratégique pour connecter trois continents
Le Maroc déploie une stratégie ambitieuse pour s’imposer comme un acteur incontournable des échanges maritimes entre l’Amérique, l’Afrique et l’Europe. Au cœur de cette vision : le nouveau port de Dakhla, infrastructure phare qui incarne les ambitions atlantiques du royaume.
Un projet structurant pour le sud marocain
Parmi l’ensemble des chantiers d’envergure lancés par Rabat, le port atlantique de Dakhla se distingue comme l’initiative la plus emblématique. Approchant de son achèvement, cette installation révèle progressivement son potentiel opérationnel. L’objectif affiché : répliquer sur la façade atlantique le succès retentissant de Tanger Med, qui domine aujourd’hui le trafic méditerranéen.
Inscrit dans la stratégie portuaire nationale à l’horizon 2030 et dans le plan de développement des provinces méridionales, ce complexe portuaire répond aux besoins spécifiques du Sahara occidental en matière halieutique, logistique et commerciale. Mais l’ambition dépasse largement le cadre régional.

Une plateforme d’envergure internationale
Conçu comme une infrastructure moderne à forte capacité, le port vise à séduire les investisseurs internationaux et à consolider la position marocaine dans les corridors logistiques et industriels atlantiques. La démarche s’inspire directement de l’expérience de Tanger Med, qui a transformé le nord du pays en pôle économique dynamique, attirant entreprises et capitaux du monde entier jusqu’à devenir le premier port méditerranéen et africain en volume d’activité.
Selon Abid Mrayzig, directeur du développement portuaire, cette infrastructure renforcera la coopération Sud-Sud et constituera un pilier essentiel de l’initiative marocaine visant à offrir un débouché maritime aux nations sahéliennes enclavées.
Des caractéristiques techniques de premier plan
Le projet englobe la réalisation d’un port en eaux profondes accueillant les plus gros porte-conteneurs, associé à une zone logistique et industrielle de 1 600 hectares. Cette dernière s’articule autour de quatre axes stratégiques :
- Créer un pôle attractif grâce à une plateforme multimodale performante
- Faciliter l’accès aux terrains industriels et aux services associés
- Stimuler les collaborations industrielles génératrices de valeur ajoutée
- Établir un hub logistique et économique tourné vers l’Afrique de l’Ouest et le Sahel
Situé à cinquante kilomètres de l’agglomération de Dakhla, le site bénéficie d’une position géostratégique privilégiée, assurant des liaisons maritimes optimales entre l’Afrique, l’Europe et les Amériques.
Une infrastructure parmi les plus modernes au monde
Techniquement, le port affiche des ambitions considérables avec une capacité annuelle projetée de 35 millions de tonnes, couvrant conteneurs, vracs liquides et solides, produits halieutiques, ressources minières et équipements d’énergies renouvelables.
Si ce volume reste inférieur aux 142 millions de tonnes atteints par Tanger Med en 2024, il faut rappeler que ce dernier représente une infrastructure établie et agrandie sur plusieurs années. Les prévisions tablent sur une convergence progressive des performances.
La multimodalité constitue un atout majeur : les connexions avec l’autoroute Tiznit-Dakhla ont été pensées pour fluidifier les flux de marchandises, tandis qu’une intégration au programme aéronautique régional renforcera l’interconnexion des modes de transport.
Une zone logistique intégrée et des installations spécialisées
À l’image de Tanger Med, Dakhla disposera d’une zone logistique adjacente évolutive, structurée en plusieurs secteurs : pôle halieutique, services mutualisés, zone industrielle polyvalente, espace commercial, centre logistique et zone portuaire dédiée de 65 hectares.
La conception privilégie une configuration insulaire reliée par un corridor terrestre, avec deux bassins principaux offrant des tirants d’eau de 12 à 14 mètres. Plusieurs quais spécialisés complètent l’ensemble : un terminal à très forte profondeur (-14 mètres) pour les charges lourdes liées aux énergies renouvelables, et trois quais commerciaux (-16 mètres) dédiés aux hydrocarbures, conteneurs et flux routiers.
Le complexe s’étendra sur 2,7 kilomètres de quais, 1,3 kilomètre de largeur et plus de 7,5 kilomètres de digues protectrices.
Une mise en service anticipée
L’investissement total avoisine 15 milliards de dirhams (environ 140 millions d’euros). L’avancement des travaux atteint 46 %, avec un pont maritime bientôt finalisé et la construction des deuxième et troisième bassins bien engagée.
Comme son homologue méditerranéen, le port a été pensé pour permettre des extensions futures, garantissant une montée en puissance progressive dans le cadre de la stratégie atlantique marocaine.
Initialement programmée pour 2027, la mise en service a été avancée : l’infrastructure devrait être opérationnelle dès fin 2026, témoignant de l’urgence stratégique accordée à ce projet par les autorités marocaines.



